HOLOCAUSTE :
LE MYTHE FONDATEUR DE LA FIN DES TEMPS

Philippe Costa

Au discours révisionniste et à son argumentation, toujours susceptibles d'appeler critiques ou controverses, les tenants de la «vérité officielle» aujourd'hui garantie par une loi de la République française en date du 13 juillet 1990 opposent une vision de la seconde guerre mondiale, et de l'«Holocauste» en particulier, toute empreinte de religiosité et d'un mysticisme qui plonge ses racines dans l'enseignement ésotérique de la Kabbale.
Certains sont tentés de voir dans cette attitude dogmatique une dérobade ou la volonté d'échapper au débat. D'autres encore iront jusqu'à dire qu'il s'agit de masquer d'immenses intérêts financiers et géopolitiques. Sans doute ces opinions expriment-elles une partie de la vérité, mais l'enjeu réel est peut-être ailleurs. Il faut se défaire ici d'une conception purement matérialiste (et surtout «matérialiste dialectique» à la façon de K. Marx) où le monde se réduit à l'économique et au financier. L'argent n'est jamais qu'un moyen et non une fin. Son caractère fongible et le développement informatique en font de plus en plus une entité comptable évanescente et fantomatique, fluidique, une onde magique… Quelle que soit l'importance des retombées politico-financières des persécutions revendiquées par les fils d'Israël, ces retombées ne constituent, à notre avis, qu'un aspect secondaire par rapport au but final dont la recherche anime l'élite juive, à savoir l'instauration d'une ère nouvelle pour l'humanité.
Nous plaçant hors de toute controverse d'ordre historique, technique ou sentimental, nous nous inspirerons ici d'une perspective philosophale sur les mythologies et les éléments symboliques qui appartiennent à l'héritage ou à la tradition des peuples anciens.

NOTIONS DE MYTHE

Comme fondement à toute civilisation, on trouve toujours sous forme poétique, allégorique, récits de batailles ou autres, un mythe dit des origines, censé relier d'un point de vue cosmique et religieux la cité et son peuple à une divinité. On parle souvent de mythe fondateur. Il y a là un pléonasme car le mythe est, par principe, fondateur. Il représente un schéma intellectuel à la fois initiateur et guide culturel des sociétés qui s'y réfèrent. Un tel mythe apparaît toujours comme un pôle de référence au-delà des oppositions d'intérêts normales dans tout groupe humain. Le mythe est ce qui unit les hommes dans un destin commun, dans une commune vision du monde.
Au fil du temps et de l'évolution du monde moderne, le sens de tels éléments tend à échapper à nos contemporains, parce qu'il ne relève pas de l'entendement primaire et immédiat. La publicité jusqu'à saturation et l'acharnement médiatique alimentent le «prêt à penser» d'une population pour qui la qualité de vie relève de la subsistance euphorique. L'homme moderne considère le mythe comme une valeur périmée, sans intérêt, qu'on ne tire des oubliettes de l'histoire que pour en faire parfois des films à grand spectacle ou des contes pour enfants.
Néanmoins, l'homme est essentiellement un être religieux et il a besoin de s'identifier et de croire à des valeurs. S'il croit vivre dans une société à la dérive, fondée sur l'individualisme et le matérialisme, il s'ouvrira, de manière inconsciente, à une «révélation» et à l'adoption d'un mythe fondateur d'une nouvelle ère. Le mythe deviendra le fondement de la dimension spirituelle qui lui manque. Il permettra une régénération et une entrée dans l'âge de la fin des temps.
En une première partie, nous évoquerons trois exemples de mythes cosmogoniques empruntés successivement à la tradition scandinave ou nordique, à la tradition tahitienne ou des mers du sud, à la légende maçonnique des confréries de bâtisseurs ; nous limitant à l'un des aspects de ces mythes, celui du «démembrement» suivi du «remembrement», nous amorcerons une comparaison avec un aspect de l'«Holocauste» des juifs.
En une seconde partie, nous traiterons des épreuves liées aux quatre éléments (terre, air, eau, feu) et nécessaires à toute initiation alchimique dans un but de qualification et de régénération spirituelle propres à assurer l'élection individuelle ou l'élection collective d'un peuple, en la circonstance celle du peuple juif. Nous montrerons, en particulier, comment ces épreuves concordent avec le rituel de la chambre à gaz et de la crémation.

— I —
MYTHES COSMOGONIQUES, DÉMEMBREMENT

Premier exemple : Récit légendaire scandinave

Au début, quand vivait Ymir, il n'y avait ni sable, ni mer. La terre n'était pas présente, ni le firmament : un gouffre béant, sans herbe nulle part !
Völuspâ

Ainsi s'exprimait la Völuspâ, le plus ancien des chants des Eddas, recueil de textes scandinaves. C'était le grand Ginnungagap, le plus profond tohu-bohu de la Kabbale, le chaos des origines, la materia prima des alchimistes.
Ymir, le géant primordial, ancêtre de l'humanité — l'Adam Kadmon des Kabbalistes, l'Orion des Grecs — naquit de la rencontre de deux forces issues du chaos : l'une du nord, monde des ténèbres où règne la glace et le givre (Niflheim) et l'autre au sud où brûle le feu (Múspellheim).

Tout comme le froid le plus âpre venait de Niflheim, tout ce qui était orienté vers le monde de Múspellheim était brûlant et clair, mais dans Ginnungagap, c'était comme un constant temps doux, et alors le courant brûlant rencontra le givre, en sorte que cela fondit et dégoutta, et de ces gouttes d'eau froide jaillit la vie par la force qui provoquait la chaleur brûlante, et cela devint une figure humaine, et il s'appela Ymir.

A ce stade de la cosmogonie, la materia prima du grand œuvre encore imparfaite — le géant Ymir ou le grand chêne du Kalévala finnois — doit être détruite pour redonner forme à une vie régénérée, débarrassée des scories et autres impuretés de la création initiale. C'est là qu'apparaît le mythe du démembrement.

Les fils de Burr — Odin et ses deux frères — tuèrent le géant Ymir. Ils prirent Ymir et le placèrent au milieu du Ginnungagap et firent de lui la terre, de son sang, la mer et les lacs, de ses os, les galets de la mer, de ses dents et des condyles, les amas de pierres et les cailloux, de sa chair, les montagnes. De son crâne, ils firent la voûte du ciel. Ils prirent aussi sa cervelle et la jetèrent en l'air et ils en firent les nuages.
Des sourcils d'Ymir, ils firent la palissade de Midgardh, futur monde des hommes.

Le souvenir de ce démembrement s'est d'ailleurs conservé jusqu'au Moyen Âge où le zodiaque fut assimilé au corps humain selon la progression suivante :

La tête au Bélier, la gorge au Taureau, les membres latéraux aux Gémeaux, la cage thoracique au Cancer, le cœur au Lion, le ventre à la Vierge, les reins à la Balance, le sexe au Scorpion, les cuisses au Sagittaire, les genoux au Capricorne, les jambes au Verseau et les pieds aux Poissons.

Tout ce qui précède nous permet de comprendre qu'Ymir constitue l'homme cosmique primordial d'où procède toute la création.
Nous venons simplement d'examiner la première phase du processus que les alchimistes de la Kabbale qualifient de solve, de dissolution par démembrement de l'homme macrocosmique. Il reste à voir la phase suivante qui constituera le remembrement, le coagula, autrement dit la création d'une humanité pure et idéale issue d'un principe divin primordial et cosmique. Ce sera notre troisième exemple.

Deuxième exemple : Mythe cosmogonique des peuples des mers du sud

Aux premiers temps il n'y avait rien. Ni terre, ni mer, ni homme, ni poissons, ni soleil, ni eau douce, ni vie. Rien que la nuit et le vide, sans aurore et sans chaleur. Seul, perdu dans l'immensité obscure, Taaroa tournait lentement, enfermé dans sa coquille de bénitier. Il tournait dans la nuit et le vide, mais il ne savait pas qu'il n'y avait que la nuit et le vide autour de lui. Il voulait sortir de sa coquille. Il s'ennuyait tout seul. Il voulait savoir ce qu'il y avait de l'autre côté de sa prison. Il souleva la moitié de sa coquille au-dessus de sa tête et fut stupéfait de ne voir qu'une nuit silencieuse. Le froid le fit frissonner. Il se pencha sur le bord de son refuge. «Y a-t-il quelqu'un, là, devant moi ?» appela-t-il. Mais il n'y avait personne et personne ne lui répondit. Alors le dieu, se voyant seul, sentit la colère le gagner. «Montagnes, sable, rocs, rivières, lacs, océans, îles… sautez jusqu'à moi !» Mais rien ne sauta jusqu'à lui. Alors il souleva sa coquille et la jeta très haut au-dessus de sa tête et elle ferma la coupole du ciel. Il avait compris qu'il lui faudrait tout créer et sa colère tomba. Il prit sa colonne vertébrale et en fit une chaîne de montagnes. Il pétrit ses mains et ses pieds, en forma une boule et ce fut la terre. Avec ses cheveux, il fit l'herbe, les fleurs, les arbres. Avec ses dents, il fit les étoiles et avec son sourire il fit la lune. Avec ses ongles des pieds et des mains il fit la carapace de tous les animaux qui vivent dans les sentiers de la terre et de la mer. Avec la sueur de son front il fit les océans, les lacs, les rivières. Avec ses larmes il fit l'eau des nuages et son sang servit à colorer les couchers de soleil. De son haleine il créa l'homme. Il lui apprit à creuser une pirogue, bâtir une maison, allumer un feu puis, ayant tout donné, son esprit, qui est indestructible, revint habiter dans la coquille qui fut sa première demeure. C'est de là, disent les anciens, qu'il regarde les hommes ; ces hommes parmi lesquels il reviendra un jour car il s'ennuie tout seul.

Troisième exemple : La légende d'Hiram, maître des bâtisseurs du temple de Salomon

Hiram, dont l'étymologie procède de Hir, qui signifie ville et de Ram, qui a le sens d'élévation, roi de la ville élevée, était architecte en chef de la construction du temps de Salomon.
Dans la franc-maçonnerie, le mythe de la mort d'Hiram constitue à la fois la cérémonie d'élévation au grade de maître mais aussi le point de départ de la recherche de la parole perdue. Autrement dit, la mort rituelle d'Hiram — au même titre que celle d'Ymir — provoque la dissolution au sein de la terre de l'initié suprême, fils de la connaissance, homme cosmique par excellence. Aux sources de la légende d'Hiram on retrouve, dans le compagnonnage, le meurtre de maître Jacques par les disciples de Soubise et, plus loin encore, en Égypte, la mort d'Osiris tué par ses frères ; Osiris est démembré et Isis, sa sœur, part à la recherche de son frère pour réunir ses parties, le régénérer et donner naissance au nouveau soleil, leur fils Horus. De même, dans la franc-maçonnerie, il appartient au maître maçon de «rassembler ce qui est épars» afin de recréer, après un passage par la mort, une vie nouvelle, une renaissance à la lumière. Cette œuvre représente la phase dite de coagulation, ou coagula des alchimistes.

Démembrement et dissolution

Dans ces trois mythes cosmogoniques, le démembrement précède un remembrement. Par exemple, issu du chaos, le géant Ymir est démembré pour donner naissance à l'univers. Ymir représente la première création, encore imparfaite. A l'instar de l'alcool, qui subit plusieurs «distillations» avant de devenir presque pur, Ymir subit l'épreuve de la séparation. Les alchimistes du Moyen Âge appelaient ce processus «séparer le subtil de l'épais». De la même façon, si l'on se place dans la perspective de l'«Holocauste» des juifs, le génocide servira à dégager du corpus judaicum (élément épais) le subtil, l'esprit qui animera, dégagé des contraintes corporelles et contingentes, le futur remembrement symbolique du peuple d'Israël.
On retrouve cette théorie dans la relativité selon Einstein. La matière brute fissionne, se démembre et libère l'énergie subtile radio-active productrice de chaleur ou d'électricité nécessaire et vitale à toute activité humaine.
L'activité de démembrement est permanente dans le camp de concentration. Tout y est programmé selon des méthodes qui ne doivent rien au hasard. Du corps, on ôte la peau, destinée à être tannée pour la fabrication de cuir (vêtements, chaussures), ou d'abat-jour. On extrait de même la graisse avec laquelle on réalise du savon. A partir des cheveux on construit des matelas ou l'on en tire des matières textiles (feutre). Des dents, on récupère l'or ou on les broie pour faire de la poudre d'ivoire. Du corps lui-même on fait de l'engrais. Les lunettes (les yeux), les chaussures (les pieds), les vêtements sont ôtés pour être recyclés… Pas une partie ne doit échapper à cette opération de démembrement, comme, dans les mythes cosmogoniques, tout sert, tout a une finalité.

Remembrement et coagulation

La phase dite du coagula ou remembrement se réalise après le passage obligé dans la chambre à gaz et surtout après la fin de la guerre, fin de l'épreuve mythique. Le juif en ressort transfiguré. La notion de race juive à part entière est enfin reconnue ; cette race qui, selon un cynisme diabolique, a même été épurée physiquement par l'envoi conscient des métis, des assimilés et de la petite classe à la mort typhique. Grâce à l'ennemi se réalise l'idéal d'une race pure, archétype du cosmos, à l'instar du démembrement d'Ymir et de son remembrement qui crée l'homme cosmique, c'est-à-dire l'image parfaite de Dieu. Là est le but de toutes épreuves initiatiques. L'homme cosmique remembré est à la fois le peuple juif régénéré et l'État d'Israël. Grâce aux six millions de morts, l'étoile de David peut désormais guider le monde.
Comme le rappelle Fulcanelli (Le Mystère des Cathédrales), l'union des deux triangles du feu et de l'eau engendre l'astre à six pointes, le sceau de Salomon, hiéroglyphe de l'œuvre par excellence et de la pierre philosophale réalisée. Le rapport avec le nombre six est évident et, si l'on admet la triunité de l'homme (esprit, âme, corps) et ses trois plans de développement, le triple six (666) s'impose à nos réflexions. La pierre philosophale ou élixir de longue vie est ce qui confère l'immortalité, ici la pérennité d'une identité psychologique, voire psychosomatique.
Ainsi «mythifiées», les souffrances collectives d'un peuple constituent autant d'épreuves propres à épurer et à redynamiser le corps psychique d'une population dispersée géographiquement et, de ce même fait, soumise aux influences dissolvantes de l'assimilation au sein des populations autochtones. Il s'agit bien là d'une syntropie recréatrice, destinée à compenser l'entropie inéluctable et irréversible de tout ce qui «existe», c'est-à-dire de tout ce qui demeure soumis aux vicissitudes de la contingence et du devenir.

— II —
LES QUATRE ÉPREUVES ET LA RENAISSANCE

Avant d'étudier sous l'angle hermétique le symbolisme des diverses étapes de l'événement qualifié «Holocauste», il importe de bien s'entendre sur la signification de certains termes.
Les appellations alchimiques qui suivent — terre, air, eau, feu — ne désignent pas des substances physiques ou chimiques, mais des principes. La terre n'est pas celle du pot de fleurs, ni l'eau, celle qui coule du robinet. En fait, et pour s'en tenir aux quatre éléments traditionnels, il s'agit des quatre étapes de la materia prima, à travers les diverses étapes de l'œuvre jusqu'à la renaissance philosophale :

Terre : solide, densification
Air : volatil, état gazeux, subtil
Eau : liquide, état fluidique
Feu : état igné, plasmique, phlogistique.

En outre, le graduel hermétique comporte impérativement une opération de «densification» à certains stades, et notamment pour débuter, qualifiée aussi de «compression». Ensuite on parlera plutôt de filtration et de décantation.
La densification postule donc la déportation en vue d'une concentration, phase préliminaire d'un processus qui se développe par étapes successives de concentrations et de dissolutions : coagula et solve.
La phase dite de coagulation concentrationnaire, ce nouvel «exode» et ses conséquences constituent, alchimiquement, le point de départ de ce véritable mythe du XXe siècle, pour ne pas dire de cette fin de cycle.

La chambre : œuvre au noir et épreuve de la terre

La problématique de l' «Holocauste» concorde avec les mythes précédemment décrits et avec les épreuves expliquées ci-dessous.
Le passage par la chambre à gaz s'identifie à une descente aux enfers. Il s'agit de la mort sacrificielle acceptée implicitement puisqu'elle exprime la volonté de la divinité, Yahwé, dieu sévère et irascible. Ne dit-on pas qu'il régnait dans le camp de concentration un fatalisme total, une résignation face à une épreuve qui dépassait la volonté individuelle ? On peut donc admettre que le peuple de Yahwé devait absolument subir cette épreuve, telle une catharsis exigée par la volonté divine.
Dans la Kabbale, la descente aux enfers correspond à l'œuvre au noir, la «Nigredo», phase de «putréfaction», le «Corbeau» selon le bestiaire traditionnel, et première étape dans la réalisation du «Grand œuvre» alchimique visant à l'obtention de l'or spirituel, à savoir la maîtrise des forces de l'univers.
C'est l'épreuve de la terre des anciens mystères telle que maintenue par certaines structures initiatiques. Ainsi, dans les rites maçonniques, la découverte du cadavre du maître Hiram amène les maîtres maçons à constater que : «la chair quitte les os… tout se désunit». Certaines variantes comportent un signe d'horreur devant le cadavre décomposé, comme il peut être suscité à la vision de corps entassés dans des fosses, au sein d'une terre saturée qui semble vouloir refuser un ultime accueil.
Pour revenir à cette catharsis que constitue l'œuvre au noir, elle s'assimile aux rites initiatiques précités : «Laissez les métaux à la porte du temple.», diront les francs-maçons. A l'instar de l'impétrant dépouillé de tout objet métallique, et souvent dévêtu, on peut se référer aux tas de bijoux et objets précieux enlevés aux déportés préalablement à une introduction dans cette véritable tombe parfois appelée «cabinet de réflexion» que peut constituer la chambre à gaz. Comme dans les anciens mystères, l'entrée en état de nudité s'assimile au retour à la matrice terrestre en vue d'une remontée vers les mondes supérieurs.
Mais il y a plus.
Par l'œuvre au noir, il faudra acquérir virtuellement toutes les possibilités contenues dans le chaos primordial qui donne naissance au cosmos. Or, étymologiquement, selon les antiques racines indo-européennes, le mot chaos dérive du même terme désignant le gaz et le bâillement. Sans aller jusqu'à l'assimilation trop facile entre chambre et bâiller, on peut admettre que le bâillement implique l'inspir et l'expir précédant l'endormissement analogue à la mort. Le choix du mot «chambre» exprime des vérités symboliques. C'est un lieu où l'on dort. Le sommeil fait passer l'être de l'état de conscience à l'état de rêve puis au sommeil profond. L'état de rêve engendre le monde imaginal, espace des songes et de la révélation où le temps est aboli.
C'est à partir de la chambre à gaz que le destin messianique du peuple juif sera révélé au sortir du processus. La chambre à gaz se révèle ainsi comme le lieu de transit nécessaire, expression du chaos dans une démarche de restauration du peuple d'Israël à travers les quatre éléments.

Le gaz : épreuve de l'air

Si le lieu de confinement et de dépouillement que constitue la chambre s'assimile à l'épreuve de la terre, la diffusion gazeuse en fait un œuf philosophal où s'effectue une seconde phase, celle de l'épreuve de l'air, élément volatil, impliquant une deuxième purification par l'acquisition des virtualités du monde subtil et aérien qui imprègnent l'individu jusqu'au tréfonds de son être : le gaz, impalpable et subtil, imprègne l'homme jusqu'à la plus petite de ses cellules. C'est un des aspects du dissolvant universel des kabbalistes.

La douche : épreuve de l'eau

Dans le cadre des quatre épreuves «élémentales», cette nouvelle étape transparaît à travers le prétexte de la douche. C'est le sacrifice de la «lustration», autre stade de purification. Psychologiquement — et ce n'est pas Freud qui nous démentira — l'immersion provoque une sensation de retour à la matrice originelle, tel le fœtus au sein de la mère entouré du liquide amniotique. La simulation de la douche replonge le futur gazé à l'origine de la vie, au niveau individuel, et à la genèse du monde, au niveau collectif, pour le peuple juif.
Conformément aux rites anciens, la douche, ou plutôt l'immersion, correspondait à une purification par l'eau. Cette idée se rencontre encore dans le baptême chrétien ou chez les hindous dans le bain au sein du Gange. Mais cette purification n'est encore que partielle et extérieure. Seul le feu achèvera l'œuvre par la purification intérieure et intégrale du corps. Igne Natura Renovatur Integra (INRI) ! [1]
Avant d'aborder l'ultime épreuve, celle du feu, et pour en terminer avec le symbolisme de l'immersion, rappelons le Déluge, déclenché par Yahwé après avoir constaté l'échec de sa création et dans un souci d'anéantir les hommes pervertis. Ainsi, dans la mythologie indo-européenne, le fait de passer victorieusement l'hiver, période glacée et ténébreuse, sera-t-il qualifié de «traversée de l'eau de la ténèbre hivernale». De même, lors du déluge, l'immense majorité de l'humanité est engloutie par les eaux. Seuls subsistent les élus de Dieu, les vainqueurs, les régénérés, les miraculés, les sauvés des eaux. Tels le Christ ou Moïse, ils seront les porteurs de la bonne nouvelle ; ils ouvriront le cycle nouveau et deviendront les dépositaires de la connaissance et du patrimoine conservé au sein de l'Arche, arche de Noé, arche d'alliance, … ou celle de la Défense… pour la fin des temps.
Cette épreuve qualifiante permet d'opérer une sélection et une épuration. Il est remarquable que les miraculés des camps de concentration témoignent comme s'ils étaient effectivement passés par la chambre à gaz. Filip Müller n'a-t-il pas écrit un livre intitulé Trois ans dans une chambre à gaz d'Auschwitz ? Tout se passe comme si les rescapés des camps avaient tous subi virtuellement l'épreuve de la chambre à gaz. De fait, ils appartiennent à cette élite qualifiée qui désormais impulsera les temps nouveaux. Il y a un avant et un après Auschwitz. A une échelle réduite, la similitude de langage avec la profanation de Carpentras est frappante : l'avant et l'après Carpentras. Cette affaire illustre d'ailleurs l'importance des morts qui, eux aussi, ont subi le rituel de la chambre à gaz et qui participent désormais, bien que sur un plan spirituel, à la régénération et à l'élection du peuple juif. On a d'ailleurs pu entendre ces slogans surprenants : «Faurisson assassine les morts» ou «Ne tuez plus nos morts !», formules qu'il convient de relire à la lumière des explications ci-dessus.

Le four crématoire : épreuve du feu

Les tenants de la «vérité officielle» ont longtemps hésité à faire du four crématoire le seul lieu rituel de mise à mort. Il est vrai que cette version présentait des inconvénients pratiques. Symboliquement, la crémation pour les morts ou l'épreuve du feu pour les vivants s'assimilent en alchimie à la voie sèche : voie fulgurante réservée aux princes et aux rois et qui les faisait passer rapidement à un état de connaissance analogue à l'or spirituel. Mais cette voie présentait de nombreux dangers et on lui a préféré la voie humide plus douce, plus sûre. C'est peut-être instruit de ces enseignements kabbalistiques que l'on a choisi en mode successif la chambre à gaz puis, en final, le four crématoire. «Communion avec ceux qui sont morts par le gaz avant d'être brûlés par le feu», a-t-on entendu le 16 septembre 1990 sur Antenne 2 lors de la cérémonie annuelle du souvenir [2].
Pour les juifs, le feu est l'expression directe de Dieu. La signification même du terme «Holocauste» le prouve. Rappelons-nous le buisson ardent dans la Bible, qui manifeste la présence de la divinité. Être brûlé signifie être rappelé à Dieu. En outre, le feu traduit, dans tous les rituels, une purification absolue qui fait passer l'individu sur un autre plan d'existence, spirituel et non plus matériel. C'est en quelque sorte une sublimation de la matière qui a été préparée, au préalable, par les trois épreuves ci-dessus décrites. Nous sommes là encore dans le symbolisme alchimique de la Kabbale. Le juif brûlé participe désormais d'un autre monde, supérieur au nôtre. Il devient la référence, la mémoire, le symbole que l'on adore, avec lequel on communie. Il s'établit donc un lien indivisible entre les morts par le feu et les vivants sur terre.
Notamment dans le discours des rescapés ou dans des films comme Holocauste, la liaison homme-dieu, terre-ciel se matérialise dans la fumée qui, sans cesse, s'échappe des fours et monte vers le ciel. Dans les rituels grecs de l'antiquité, la fumée des graisses de viande était un hommage et une offrande aux dieux. Une fois de plus, la notion de sacrifice apparaît dans le rituel de la magique chambre à gaz.
Le traitement ultime par le feu constitue un aboutissement inéluctable, où le symbolisme de la cheminée, axe du monde, unit ce qui est en haut avec ce qui est en bas. Elle s'apparente, à bien des égards, à l'échelle de Jacob, «chemin» privilégié de communication entre les divers plans, et favorise l'accès aux sphères célestes du volatil concentré et purifié, dégagé de toute corporéité contingente, à l'issue des diverses opérations de l'œuvre.
Le phénomène de la déportation correspond aux vieux rituels solsticiaux liés au feu. Des quatre points cardinaux de l'Europe, les déportés affluent vers le lieu central du sacrifice. C'est la résorption de la croix en son centre. La matière alchimique, ou substance vitale collective d'un peuple, se densifie, se potentialise, puis se sublime par le feu, coagula et solve, une fois de plus. Au centre de cette tragédie cruciale, de cette confrontation des forces lumineuses ou ténébreuses selon les acteurs — Múspellheim ou Niflheim — apparaît la petite ville d'Auschwitz. Une ville parmi d'autres, pensera-t-on. Peut-être pas, à y regarder de plus près.
Dans le cas de l'«Holocauste», Auschwitz joue un rôle analogue aux centres traditionnels antiques tels Rome, Delphes ou la Thulé hyperboréenne. Il serait intéressant de voir si l'origine d'Oswiecim (nom polonais d'Auschwitz) aurait un sens pour la géographie sacrée.

LA FIN DES TEMPS

Mais la raison de ce bel édifice ?
Laissons la parole au grand rabbin Sitruk, qui s'exprimait dans le journal Le Monde du 3 octobre 1990 au sujet de l'affaire de Carpentras :

[…] en tant que juif, on ne peut faire l'impasse sur une promesse prophétique qui voit dans l'Israël de demain un État de spiritualité intense, à partir duquel la parole de Dieu sera diffusée aux hommes de toutes les confessions.
[…] La France a réalisé qu'à travers le corps d'un vieillard juif on avait attenté à l'image de l'homme. J'ajoute : à l'image de Dieu.
[…] Ce qui est en question ici, c'est le moyen d'arriver au but. Le but, comme le disaient les prophètes, est de faire du peuple juif une lumière pour toutes les nations.

A propos d'une déclaration du cardinal Etchegaray qui lui disait : «Vous êtes le tronc, nous sommes une branche», Sitruk affirme :

C'est cela que le peuple juif attend comme reconnaissance à la fin des temps.

Selon les prophéties, le peuple juif élu de Dieu doit faire rentrer l'humanité ignorante dans une nouvelle ère de spiritualité. C'est le règne de la fin des temps où l'histoire n'existe plus, où les guerres sont abolies, où règnent la paix et la joie dans la lumière d'Israël : la Jérusalem céleste enfin réalisée sur terre. Mais, pour que s'accomplisse ce dessein, il fallait subir, à l'instar des initiateurs de religions ou de mythes (Ymir, Odin, Hiram, le Christ …) un sacrifice suprême. L' «Holocauste» jouera cette fonction pour le règne de la fin des temps.
Mais, selon les traditions anciennes, la fin du monde moderne sera précédée d'une période appelée «la grande parodie» ; celle-ci n'aura pas pour fondement un mythe authentique et régulier mais se réduira à une imitation, à un simulacre. Ce sera l'apocalypse de saint Jean, le règne de l'Antéchrist ou le 666, le Ragna rök (obscurcissement du divin), la phase ultime du Kali Yuga (âge sombre). Cette «grande parodie» reposera sur un renversement de toutes les valeurs, un ordre inversé, où les messes et les célébrations constitueront un rappel du sacrifice rituel de la chambre à gaz ; ainsi, par exemple, à la croix du Christ, instrument de sacrifice, tentera-t-on de substituer un autre instrument de sacrifice : la chambre à gaz précisément.
Dans le mythe de l' «Holocauste», tout semble concorder et tout paraît ordonné. Or, selon la vision traditionnelle du monde, l'ordre lui-même est un mythe, peut-être celui que véhiculent les enseignements d'Ymir, de Taaora ou d'Hiram. Ce ne saurait être le cas de «la grande parodie» holocaustique surgie en plein XXe siècle ; son ordre apparent n'est qu'un simulacre ; il révèle la fin d'une civilisation.
L'édifice holocaustique est aujourd'hui bâti. Reste à jouer le dernier acte : celui du règne de la fin des temps, celui de la parodie annonciatrice de la fin du monde moderne, ce monde qui ne repose jamais que sur une illusion.


  1. En langage exotérique : Iesus Nazarenus Rex Iudæorum

  2. Date anniversaire et «souvenir» également de la tentative d'assassinat du professeur Faurisson, un an plus tôt, dans un parc de Vichy.


Revue d’Histoire Révisionniste, n° 3, novembre-décembre 1990, p. 44-58


Retournez à la table de matières de RHR n° 3