Traduit de l'anglais
ATROCITÉS AMÉRICAINES EN ALLEMAGNE
(Article du juge E.L. Van Roden,
«American Atrocities In Germany»,
Dans les procès dits de «crimes de guerre» ou de «crimes contre l'humanité», on s'est beaucoup fondé sur les aveux ou les confessions des «criminels». Il nous a paru opportun de rappeler dans quelles conditions ces aveux ou ces confessions avaient pu être recueillis. A ce sujet, l'article du juge américain, Edward L. Van Roden, publié en 1949, reste du plus haut intérêt.
Pour obtenir des aveux, les enquêteurs américains du Tribunal américain de Dachau en Allemagne utilisaient les méthodes suivantes :
Ils battaient les accusés et leur donnaient des coups de pied brutaux ;
Ils leur faisaient sauter les dents, leur brisaient la mâchoire ;
Ils conduisaient des simulacres de procès ;
Ils maintenaient les accusés en solitude totale ;
Ils se faisaient passer pour des prêtres ;
Ils leur donnaient des rations alimentaires très faibles ;
Ils les privaient de toute forme de spiritualité ;
Ils leur promettaient l'acquittement.
Des plaintes relatives à ces méthodes de troisième degré
ont été reçues au printemps dernier par le Secrétaire d'État à l'Armée
Kenneth Royall. Ce dernier désigna le juge Gordon Simpson de la cour suprême
du Texas ainsi que moi-même pour aller en Allemagne afin de vérifier ce qui
était rapporté. Accompagnés du lieutenant-colonel Charles Lawrence Jr., nous
nous sommes rendus à Munich, en Allemagne, y avons ouvert des bureaux et avons
entendu alors un flot de témoignages sur les conditions dans lesquelles
étaient commises des atrocités américaines.
Mais, tout d'abord, quelques explications de fond :
Au printemps dernier, la cour suprême refusait la demande d'habeas corpus
formulée par le colonel Willis N. Everett Jr., juriste américain, qui avait
été avocat de la défense des 74 accusés allemands dans l'affaire bien connue
de Malmédy. Everett est un avocat très compétent ; c'est un gentleman
consciencieux et sincère. Ce n'est pas un fanatique.
Dans sa requête, Everett dénonçait le fait que le procès des Allemands
n'avait pas été équitable. Il ne prétendait pas que tous les accusés
allemands étaient innocents, mais précisait qu'en raison du caractère
arbitraire de leur procès, il était impossible de distinguer les innocents des
coupables.
Le drame, c'est que nous, Américains, qui avons combattu et gagné la guerre en
donnant tant de notre sueur et de notre sang, nous soyons si nombreux à dire
aujourd'hui : «Tous les Allemands doivent être punis». Nous avons gagné la
guerre, mais certains d'entre nous veulent continuer à tuer. Cette attitude me
semble inique.
Si les accusations accablantes d'Everett devaient se révéler exactes, la
conscience américaine en serait souillée pour l'éternité. Le fait que les
Allemands aient commis pendant la guerre des atrocités contre des Américains
ou que des Américains en aient commis contre des Allemands ne diminuerait pas
le moins du monde notre infamie si de telles atrocités en temps de paix
devaient continuer sans protestation.
La tâche spécifique qui nous avait été assignée ne consistait pas seulement
à examiner les accusations du colonel Everett, mais également à traiter le
cas de 139 condamnations à mort, lesquelles, à l'époque, n'avaient pas encore
entraîné d'exécution ; 152 Allemands avaient déjà été exécutés.
Les 139 condamnés encore vivants se répartissaient en trois groupes. Ils
étaient accusés d'être impliqués dans les crimes du camp de concentration de
Dachau, dans le meurtre d'aviateurs américains ou dans les massacres de
Malmédy. Je vous dis tout de suite que je crois que les crimes pour lesquels
ces Allemands ont été jugés ont réellement été commis, et que certains
Allemands s'en sont rendus coupables.
Mais cette haine aveugle de tous les Allemands, qui a éclaté pendant et après
la guerre, ne doit pas nous empêcher de prétendre que seuls doivent être
punis les coupables.
Après cette enquête, et après avoir discuté de part et d'autre, je ne pense
pas que le peuple allemand ait su ce que faisait son gouvernement. Je demeure
convaincu que la population allemande n'avait aucune idée des crimes
diaboliques que commettait ce monstre insigne d'Himmler dans les camps de
concentration. D'après les atrocités dont nous avons eu connaissance, il
fallait qu'il soit véritablement le prince des démons.
Mais en ce qui concerne la grande masse des Allemands, ils ont combattu comme
des citoyens loyaux, pour faire vivre leur patrie et pour la défendre.
Quelques aviateurs américains dont les avions avaient été abattus au cours
des raids de bombardement au-dessus de l'Allemagne ont été tués par des
civils allemands. Ces Allemands éprouvaient le sentiment que les aviateurs
américains étaient les meurtriers de leurs épouses, de leurs mères et de
leurs enfants sans défense qui habitaient les cités bombardées — exactement
comme les Anglais l'éprouvèrent à l'égard des aviateurs allemands. C'est
cela, la guerre.
Je pensais profondément à ces aviateurs. J'avais deux fils dans l'aviation.
Jimmy devait remplir 35 missions au-dessus de l'Allemagne et en revenir sain et
sauf, Dieu merci ! Dick accomplit 32 missions et son avion fut finalement abattu
au- dessus de l'Italie. Il passa 12 mois dans un camp allemand de prisonniers de
guerre et fut assez bien traité. Il se trouve maintenant dans un sanatorium de
l'Arizona et se remet de la tuberculose qu'il a contractée dans ce camp.
* * *
Les massacres de Malmédy ont réellement eu lieu : un groupe
de prisonniers de guerre américains fut abattu après sa capture au cours de la
bataille des Ardennes. Mais n'est-il pas possible d'établir une distinction
entre l'affirmation de la réalité de ces atrocités et l'affirmation que ces
dernières ont été commises par ces 74 Allemands qui s'étaient alors trouvés
à Malmédy ou dans ses environs à ce moment ?
Du fait que certains Allemands, pris à part, méchants et sadiques, en ont
été les auteurs, avons-nous le droit de dire que tous les Allemands, quels
qu'ils soient, qui tombent entre nos mains sont coupables et doivent être
anéantis ? Personnellement je ne le crois pas. Ce n'est pas le mode de pensée
que j'ai appris dans mon église ou que vous avez appris dans la vôtre.
Sur l'insistance des Russes, les Américains n'ont pas pu juger de nouveau ces
hommes. Dans ce domaine, la philosophie russe est que les enquêteurs
déterminent la culpabilité ou l'innocence des accusés et que le juge prononce
simplement la sentence. Nous avons accepté la formule russe du refus d'un
nouveau jugement, mais avons fait litière de la présomption d'innocence avant
le procès.
L'interdiction américaine de déposer sur la foi d'un tiers avait été
suspendue. Le témoignage de seconde et de troisième main était admis, bien
que l'avocat général eût mis en garde contre la valeur d'une déposition sur
la foi d'un tiers, en particulier lorsque celle-ci était obtenue, comme
c'était le cas, deux ou trois ans après les faits.
Le lieutenant-colonel Ellis et le lieutenant Perl, du ministère public,
invoquèrent qu'il était difficile d'obtenir des preuves satisfaisantes.
Perl déclara à la cour : «Nous avions une cause difficile à élucider et
avons dû utiliser des méthodes persuasives». Il avoua à la cour que les
méthodes persuasives comportaient divers «expédients, y compris une certaine
violence et des simulacres de procès». Ultérieurement, il devait dire à la
cour que les procès reposaient sur des déclarations obtenues par des méthodes
de ce genre.
Les déclarations reconnues comme constituant des preuves ont été obtenues de
la part d'hommes qui, auparavant, avaient été tenus en solitude totale pendant
trois, quatre et cinq mois. Ils étaient renfermés entre quatre murs dépourvus
de fenêtre, sans possibilité d'exercice physique. On leur poussait deux repas
chaque jour au travers d'une fente pratiquée dans la porte. Ils n'avaient pas
le droit de parler à qui que ce fût. Pendant tout ce temps ils ne purent pas
communiquer avec leurs familles ni avec un pasteur ou un prêtre.
Cette solitude totale se révéla suffisante en elle-même dans certains cas
pour persuader les Allemands de signer des déclarations préparées à
l'avance. Ces déclarations impliquaient non seulement les signataires, mais
souvent aussi d'autres accusés.
* * *
Nos enquêteurs mettaient une cagoule noire sur la tête de
l'accusé puis lui martelaient le visage avec un coup de poing américain, lui
donnaient des coups de pied et le frappaient avec un tuyau de caoutchouc. Ces
brutalités firent sauter les dents de nombreux accusés allemands ; certains
eurent la mâchoire fracturée.
Dans les 139 cas examinés, tous les Allemands, sauf deux, avaient été
frappés à coups de pied dans les testicules de manière irréparable. C'est ce
que les enquêteurs américains appelaient un Procédé d'Application Standard.
Perl reconnut avoir utilisé des simulacres de procès et appliqué des
méthodes persuasives incluant la violence ; il déclara que la cour était
libre de décider du poids à accorder aux dépositions ainsi reçues. Mais
toutes furent admises.
Un accusé âgé de 18 ans, après avoir été roué de coups, était en train
d'écrire une déposition qu'on lui dictait. A la seizième page, le garçon fut
enfermé pour la nuit. Au petit matin, les Allemands des cellules voisines
l'entendirent grommeler : «Je ne prononcerai plus un seul mensonge». Plus
tard, lorsque le geôlier entra dans la cellule pour lui faire terminer sa
fausse déposition, il trouva l'Allemand mort, pendu à un barreau de sa
cellule. Malgré tout, une déclaration écrite selon laquelle cet Allemand se
serait pendu pour se soustraire à la signature fut présentée et acceptée
comme preuve lors des procès des autres accusés.
Quelquefois, le prisonnier qui refusait de signer était conduit dans un local
faiblement éclairé, où un groupe d'enquêteurs civils portant l'uniforme de
l'armée américaine se tenait assis autour d'une table noire au centre de
laquelle était posé un crucifix, avec deux bougies allumées de chaque côté.
«Tu auras maintenant ton procès américain», disait-on à l'accusé.
Ce faux tribunal prononçait une fausse condamnation à mort. On disait alors à
l'accusé : «Dans quelques jours, tu seras pendu, dès que le général aura
approuvé cette condamnation ; mais, en attendant, signe ces aveux et nous
pourrons te faire acquitter». Certains ne voulaient toujours pas signer.
Nous avons été choqués d'apprendre que le crucifix était tourné ainsi en
dérision.
Dans un autre cas, un faux prêtre catholique (c'était en fait un enquêteur)
pénétra dans la cellule de l'un des accusés, entendit ce dernier en
confession, lui accorda l'absolution, puis lui donna une petite tape amicale en
lui disant : «Signe tout ce que les enquêteurs te demandent de signer. Ça te
permettra d'obtenir ta liberté. Même si ta déclaration est fausse, je peux te
donner d'avance l'absolution pour le mensonge que tu pourrais raconter».
Notre rapport final sur ces procès a été remis au secrétaire d'État à
l'armée Royall. En dépit des nombreux exemples semblables à ceux que je viens
de décrire, nous n'avons trouvé aucune machination de caractère général
visant à obtenir des dépositions d'une façon malhonnête. A l'exception de 29
cas, aucune raison n'apparut à nos yeux pour que les exécutions n'aient pas
lieu. Pour les 110 autres, il existait suffisamment de témoignages sérieux
obtenus à partir d'autres sources pour justifier la peine de mort, en excluant
les témoignages obtenus par des méthodes du troisième degré.
Les 29 hommes dont nous recommandions de commuer la peine n'ont certainement pas
eu de procès équitable, si on se base sur le modèle américain. Vingt-sept
d'entre eux devaient être condamnés à la prison à vie ; l'un d'eux devait
être condamné à dix ans, et enfin, un autre, à deux ans et demi de prison,
conformément à nos recommandations. Nous avons également recommandé un
programme permanent de clémence pour une révision des sentences prononcées
contre d'autres prisonniers accusés de crimes de guerre.
Le secrétaire d'État Royall a sauvé notre conscience nationale. En tant
qu'Américains, pourrions-nous jamais tenir la tête haute s'il n'avait pas pris
l'affaire en considération ? Il a sauvé notre prestige national et notre
réputation internationale.
Cependant, en dépit de l'action entreprise par le secrétaire d'État Royall
dans cette affaire, les Américains ont, à vrai dire, peu de raisons de se
regarder avec complaisance. Notre rapport révèle plutôt, de manière
implicite, que notre situation est toujours sérieuse en Allemagne et qu'il faut
procéder à une remise en ordre. Qui plus est, cinq des hommes pour lesquels
nous avions recommandé des commutations de peine ont été pendus depuis la
remise de notre rapport. En tout, 100 hommes sur les 139 dont nous avons
cherché à étudier le cas sont maintenant morts.
* * *
Les enquêteurs américains qui ont commis des atrocités au
nom de la justice américaine et sous la bannière américaine s'en tirent sans
être inquiétés.
Aujourd'hui, il convient de viser deux objectifs :
Les 39 prisonniers dont les condamnations à mort n'ont pas été commuées et qui n'ont pas encore été pendus doivent être épargnés, en attendant une révision complète du jugement.
Les enquêteurs américains qui ont fait preuve d'abus de pouvoir du fait de la victoire et ont prostitué la justice pour la transformer en vengeance doivent être démasqués dans un procès public, de préférence aux États-Unis, et poursuivis.
A moins que ces crimes commis par des Américains ne soient dévoilés par nous-mêmes dans notre pays, le prestige de l'Amérique et de la justice américaine subira une atteinte permanente et irréparable. Nous pouvons partiellement racheter notre propre mauvais comportement si, en premier lieu, nous le délimitons et si, publiquement, nous le condamnons et le désavouons. Si nous attendons que nos ennemis claironnent notre culpabilité à l'étranger, alors nous ne pourrons qu'incliner nos têtes en reconnaissant notre honte.
Revue d’Histoire révisionniste, n° 6, mai 1992, p. 22-28
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